Jean Mattern, à fleur de mots

jeanmaTTTEmile et David s’aiment. Cela fait vingt cinq ans que cela dure. Emile est neurochirurgien et David, issu d’une famille fortunée, écrit des biographies de musiciens méconnus. Ils habitent ce bel appartement non loin de l’île aux Cygnes, d’où l’on a une vue extraordinaire sur tout Paris. Une vue exceptionnelle.

Lui, Emile, a dès le plus jeune âge su. Il a multiplié les histoires d’un soir, qui correspondaient bien à la carrière exigeante qu’il entreprenait. Jusqu’à ce qu’il rencontre David.

David, au contraire, a eu une vie avant. Durant laquelle il a failli devenir père en adoptant le fils de sa compagne.

25 ans plus tard, le presque fils adoptif de David, Simon, se rend en consultation chez Emile.

L’occasion pour l’auteur de s’interroger sur les pouvoirs du destin et le poids de nos décisions sur la trajectoire de nos vies.

Soyons clairs dès le début. On ne lit pas Jean Mattern parce qu’il avance dans le fracas assourdissant du marketing bien ficelé par son éditeur. On ne lit pas non plus Jean Mattern parce qu’on le voit partout tout le temps, de Besançon à Nancy, des Blancs-Manteaux à François Busnel.

Loin du brouhaha médiatique, Jean Mattern, dont voici le cinquième roman, avance à pas feutrés dans cette rentrée littéraire, avec ce court roman de 120 pages tout de grâce et de délicatesse. L’auteur capte avec délicatesse l’infiniment sensible, l’infiniment subtile qui parfois fait basculer les vies. Comment des événements parfois mineurs font dévier parfois d’une cheveu nos existences et entraînent de grands bouleversements.

D’une rare élégance, l’écriture de Jean Mattern, tout en battements de cœur, sait distiller cette petite musique si précise, si confondante de simplicité, pour esquisser les interrogations de ses deux héros posés sur la brèche du destin par l’irruption dans leur vie de l’enfant que l’un d’eux, dans une autre vie, a failli adopter. Le récit avance tout seul, en mots comptés, sans ratures, ni fioritures, lancé dans un seul mouvement d’une grande élégance teinté d’une douce mélancolie.

« Les choses de la vie se conjuguent et s’assemblent selon leurs rythmes et on ne sait jamais vraiment jusqu’à quel point on reste maître d’œuvre de ces constructions souvent bancales qui en résultent »

On ne rentre pas dans un roman de Jean Mattern avec les yeux. Il suffit de tendre l’oreille et de prêter attention à ces quelques pages si savamment orchestrées. Précieux pour dire l’essentiel.

Une vue exceptionnelle de Jean Mattern aux éditions Sabine Wespieser.

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